mardi 25 octobre 2011

Koyaanisqatsi de Godfrey Reggio

Koyaanisqatsi est un documentaire américain réalisé par Godfrey Reggio en 1982. Il est produit par Francis Ford Coppola.



C'est difficile de parler de Koyaanisqatsi dans une conversation ordinaire de cinéphile, même déviant. D'abord parce qu'il y a de fortes chances que l'interlocuteur ne soit pas intéressé (jugez plutôt : un documentaire sans véritable sujet, sans paroles et sans explications). Ensuite parce-que le nom Koyaanisqatsi est difficile à mémoriser (et à épeler, heureusement que Google sait corriger l'orthographe).

En langue Hopi, le titre veut dire "vie folle" mais qui parle cette langue ? Il doit rester à tout casser 6000 Hopis en Amérique du Nord. Et sans Wikipédia cette peuplade amérindiennes ne serait connue que des ethnologues. En fait Godfrey Reggio ne voulait même pas donner de nom à ses films, poussant jusqu'au bout ce choix délibéré de ne pas utiliser de mots et de verbes. Quand il a dû se résoudre à le faire, il s'est rabattu sur une langue inconnue pour rester le plus neutre possible.

Le film se concentre sur l'emballement du monde moderne pour la technologie, sur l'urbanisation tentaculaire et certainement sur des tas d'autres choses. Mais c'est difficile à dire, car Koyaanisqatsi (merci le copier-coller) est avant tout une œuvre conceptuelle. Comment la décrire ? Vous voyez le générique de Des Racines et des ailes ? Et bien c'est ça pendant 87 minutes (d'ailleurs, les images dudit générique sont directement tirées de Koyaanisqatsi). Sauf que plus ça se prolonge, plus les possibilités d'interprétations sont riches.

Le film s'ouvre sur trois prophéties Hopi :

Si l'on extrait des choses précieuses de la terre, on invite le désastre.

Près du Jour de Purification, il y aura des toiles d'araignées tissées d'un bout à l'autre du ciel.

Un récipient de cendres pourrait un jour être lancé du ciel et il pourrait faire flamber la terre et bouillir les océans.

A part ces quelques lignes énigmatiques, Koyaanisqatsi ne contient pas de commentaires, pas d'explications, pas de dialogues, pas d'intrigue et pas de chronologie. Tout au plus peut-on le découper en séquences, plus somptueuses les unes que les autres. Car Koyaanisqatsi est terriblement beau, majestueux, froid et complexe. Il brilles par ses mises en parallèles osées et visuellement inventives. Les vues aériennes d'une ville se transforment par la magie du montage en des photographie de circuits imprimés, et les flux humains deviennent des flux d'électrons dans une citadelle de transistors. Les logements sociaux de Pruitt-Igoe s'écroulent avec majesté. Une fusée s'élève vers l'infini... Et des débris retombent et s'enflamment en entrant dans l'atmosphère...

L'œuvre fait un usage intense de l'intervallomètre, un dispositif qui permet de prendre des prises de vues à des intervalles définis très espacés. Cela permet de filmer en accéléré des tas des scènes de la vie quotidienne, ou de la nature, et de leur donner une dimension frénétique et surréaliste.

Accompagné d'une musique de Philip Glass terriblement contemporaine, la bande son évolue entre des cuivres lents et un synthétiseur ultra-rapide, en fonction des images évoquées. Au final, ce premier Qatsi est un incontournable du cinéma. Très remarqué à sa sortie, il a inspiré Baraka, Chronos, Samsara et Manufactured Landscapes.

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